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A.D.N.

La destinée des noms de famille ou le pouvoir des gènes

A quoi tient la destinée d’un nom de famille ? Sa survivance ou son extinction ? Son développement ou sa disparition ? Au fait que les gens se marient, bien sûr, ou ont une vie en couple. Au fait que ces couples ont des enfants, évidemment. Au fait que ces enfants aient eux-mêmes des enfants, nécessairement. Mais cela ne suffit pas.

Il y a au fond de nous quelque chose que nous ne maîtrisons pas, et qui pourtant régit la survie ou l’anéantissement de notre nom de famille : nos gènes, et en particulier ce vingt-troisième chromosome, dit chromosome sexuel. Comme son nom l’indique, c’est lui qui détermine si l’on naît garçon ou fille.

La transmission du nom

Cette réflexion m’est venue il y a quelques jours alors que je parcourais les documents hérités de mon cousin Pierre, féru d’histoire de la famille. Je me suis souvenu d’une réflexion qu’il m’avait faite quelques années avant sa mort : « Tu sais qu’il n’y aura bientôt plus de SIGNE à Buc[1] ! ». Cette révélation m’a fait l’effet d’une gifle. Comment était-ce possible ? J’ai toujours considéré Buc comme le berceau de notre famille. Et à raison, puisque d’après nos recherches, nos ancêtres vivent là depuis au moins le milieu du XVIIᵉ siècle.

Nom de famille et gènes : Buc
Vue générale de Buc (photo A. BOURGEOIS)

Pour bien comprendre ce qui se passe, il faut se souvenir que notre société est patriarchale. Seul le nom du père se transmet de génération en génération. Dans d’autres sociétés à travers le monde, cette analyse serait inexacte. J’ai l’air d’enfoncer une porte ouverte, certes. Mais ce point est sans doute le plus important.

Ainsi, dans notre monde occidental, notre nom est celui de notre père, et de son père avant lui. C’est donc traditionnellement au garçon qu’il incombe de donner son nom de famille à un enfant[2].

Petit calcul savant

Alors je me suis posé la question : et si le nom de SIGNE venait à disparaître ? Je sors mes tableaux et ma calculatrice. Mon grand-père a eu treize enfants, dont neuf garçons (70%). Sept d’entre eux ont fondé une famille et transmis leur nom. A la génération suivante, quatorze des vingt enfants porteurs du nom SIGNE sont des garçons (70%). La situation n’est pas si dramatique qu’elle en avait l’air. C’était compter sans la troisième génération, celle des arrière-petits-enfants. Ils sont toujours quatorze garçons, mais sur trente-et-un enfants portant le nom SIGNE (45%). La quatrième génération n’est pas représentative puisque certains de ses « membres » sont encore jeunes.

Nom de famille et gènes : la famille SIGNE en 1914
Mes grands-parents et leurs treize enfants en 1914

Vous me direz qu’avec quatorze garçons, la situation n’est pas désespérée. Pas si sûr.

Je me suis penché sur la branche d’un de mes oncles. Il fut le père de cinq enfants, dont trois garçons. Son fils aîné a lui-même engendré six descendants, mais un seul garçon, lequel n’a qu’une fille. Le second a eu quatre filles. Quand au troisième, il n’a pas eu d’enfant. Et voilà comment, en deux générations, le nom s’est éteint dans cette branche, pourtant la plus vigoureuse de notre famille par le nombre de descendants.

Evidemment, le fait qu’un nom de famille disparaissent dans un village ne tient pas seulement à la naissance ou non de garçons dans la famille. Notre vie actuelle et l’éparpillement des familles en sont une cause tout aussi importante.

Ainsi, notre nom ne tient qu’à un fil, ou plutôt à une petite hélice, celle de l’A.D.N. de ce fameux chromosome qui détermine notre sexe, et aux caprices de la génétique.

Notes

[1]     Buc est un petit village du Territoire-de-Belfort. Sous l’Ancien Régime, la paroisse inclut les habitants catholiques de Mandrevillars, village de l’actuelle Haute-Saône, situé à moins de trois kilomètres.

[2]     Ce que j’explique ici, qui a déterminé des générations de noms de famille, n’est plus tout à fait exacte depuis le 1ᵉʳ janvier 2005. Mais je ne rentrerai pas ici dans les détails.

Cette publication a un commentaire

  1. Noëline Visse

    Sur ma branche paternelle, la situation est presque identique, sur les dix-neuf petits enfants que nous sommes, seulement trois garçons portent le nom Visse et un seul petit cousin de mon père. Heureusement, de nos jours, les femmes mariées peuvent garder leur nom et le transmettre, ça donne un peu d’espoir 😀

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